Espionnage industriel : les réponses juridiques

Quels sont les moyens de défense à la disposition des entreprises qui sont la cible d’espionnage industriel ? Voici un aperçu des différents outils préventifs et défensifs qu’elles peuvent utiliser.

Il est essentiel de comprendre qu’en France, l’espionnage industriel en tant que tel n’est pas sanctionné : ce sont les méthodes illégales employées par les entreprises pour obtenir les secrets de leurs concurrents qui sont punies. Par exemple, une personne qui dérobe ou détourne des documents confidentiels peut être sanctionnée pour vol, un délit réprimé par la loi.

La recherche des secrets des concurrents n’est donc pas en soi répréhensible : elle le devient seulement lorsque des méthodes déloyales sont utilisées. Parmi ces méthodes, l’une des plus courantes est l’embauche d’un employé ayant quitté une entreprise concurrente dans le but de recueillir des secrets de fabrication ou des dossiers commerciaux de cette société.

Plusieurs affaires internationales ont révélé l’existence d’espionnage industriel, bien que les tribunaux judiciaires ne retiennent pas toujours cette notion. La protection européenne du secret des affaires offre une solution nouvelle. Cependant, la plupart des cas de captation malveillante sont liés à des faiblesses humaines ou organisationnelles. Peu importe la méthode employée, c’est l’information stratégique de l’entreprise qui est ciblée.

Il convient de noter qu’une directive européenne 2016/943 du 8 juin 2016 sur la protection des secrets d’affaires établit des règles communes pour protéger les entreprises de l’Union européenne contre l’obtention, l’utilisation et la divulgation illicites de leurs informations sensibles. Cette directive a été transposée en droit national par la loi n° 2018-670 du 30 juillet 2018 relative à la protection du secret des affaires et le décret n° 2018-1126 du 11 décembre 2018. Ces deux textes confèrent aux juges des pouvoirs étendus pour prévenir ou mettre fin à une atteinte au secret des affaires.

Selon les articles 411-1 et suivants du code pénal, l’espionnage est sévèrement puni. Il s’agit de la remise de documents, de matériel, d’équipements, etc., à une puissance étrangère, à une organisation étrangère ou sous contrôle étranger.

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Le secret des affaires.

L’article L. 151-1 du code de commerce introduit la définition du secret des affaires. L’information protégée doit répondre aux critères suivants :

  • Elle n’est pas généralement connue ou facilement accessible pour les personnes familières de ce type d’informations en raison de leur secteur d’activité, que ce soit en elle-même ou dans la configuration et l’assemblage précis de ses éléments.
  • Elle a une valeur commerciale, réelle ou potentielle, en raison de son caractère secret.
  • Son détenteur légitime a pris des mesures de protection raisonnables, compte tenu des circonstances, pour préserver son caractère secret.

Ainsi, l’information qui peut être protégée en tant que secret des affaires est une information connue par un nombre limité de personnes, qui a une valeur commerciale, réelle ou potentielle, en raison de son caractère secret, et qui est raisonnablement protégée pour préserver ce caractère secret.

Prévenir les risques.

Un contrat de travail ou un accord avec un prestataire externe peut légitimement inclure une clause de confidentialité, dont les effets perdurent après la fin du contrat de travail, ainsi qu’une clause de non-concurrence (voir plus loin). Un employé qui viole ces clauses en commettant de l’espionnage peut être sanctionné et licencié. Cependant, il faut faire attention car la validité de cette clause dépend du respect de plusieurs critères légaux (notamment une compensation financière pour la clause de non-concurrence).

Des politiques distinctes peuvent être mises en place concernant la création et la propriété des actifs de propriété intellectuelle d’une part, et la confidentialité d’autre part. Il est donc dans l’intérêt d’une entreprise de promouvoir une politique générale de sensibilisation des employés à la confidentialité. Cependant, même en l’absence de clause de confidentialité, un employé est de toute façon soumis à une obligation générale de loyauté envers son employeur. Une clause de confidentialité peut également être insérée dans les contrats conclus avec des partenaires externes. Cette clause, assortie d’une sanction financière en cas de non-respect, dissuadera la divulgation d’informations à des tiers.

Les moyens de défense.

La législation pénale ne punit pas directement l’espionnage industriel, mais elle réprime diverses méthodes illégales employées par les entreprises pour accéder aux secrets de leurs rivaux. Par exemple :

  • Le vol ou la détournement de documents confidentiels sont punis en tant que délits de vol (C. pén., art. 311-1) ou d’abus de confiance (C. pén., art. 314-1 et s. et 314-12).
  • La corruption d’employés est également sanctionnée (C. pén., art. 445-2).

Il est important de noter que la recherche des secrets des concurrents n’est pas en soi répréhensible ; elle devient fautive uniquement lorsqu’elle est effectuée par des moyens déloyaux. L’un des moyens les plus courants est l’embauche d’anciens employés de l’entreprise concurrente dans le but de découvrir les secrets de fabrication ou d’accéder aux dossiers commerciaux de cette entreprise. Cette pratique est considérée comme de la concurrence déloyale.

L’acquisition, par des moyens déloyaux, d’informations confidentielles concernant l’activité d’un concurrent, par l’intermédiaire d’un ancien employé, est un acte de concurrence déloyale (Cass. com., 8 févr. 2017, n° 15-14.846, n° 203 F-D).

En cas de tels agissements, une action en responsabilité civile est envisageable, ainsi qu’une action en responsabilité délictuelle.

La confidentialité de certaines professions.

Certaines professions sont soumises à une obligation de confidentialité plus stricte que d’autres. Par exemple, les employés de banque qui, en révélant des informations biaisées sur une entreprise, peuvent porter atteinte à sa réputation et provoquer sa déconsidération.

C’est également le cas pour :

  • les fonctionnaires de l’administration fiscale ;
  • les experts-comptables et les commissaires aux comptes ;
  • les notaires et les clercs de notaires ;
  • les professions médicales et paramédicales ;
  • les magistrats et les avocats, etc.

Pour toutes ces professions, la divulgation d’un secret est strictement interdite. La sanction prévue est sévère, avec une peine d’un an de prison et une amende de 15 000 euros (C. pénal, art. 226-13).

Thomas d. C.
La rédaction International ICS.